Performance est peut-être le mot le plus incompris de notre époque. Pour certains, être responsable, engagé sur les défis de long terme, être intelligent avec l’humain et plus encore avec le vivant, nécessiterait de renoncer à cette quête – très XXe siècle – de la performance. Pour d’autres, il apparait que, dans un environnement challengé, sans visibilité, pour relever ses défis et devenir tout ce à quoi l’on aspire, il est nécessaire d’être collectivement performant. Non plus individuellement performant (injonction, épuisement) mais collectivement en tant que système répondant à des valeurs et des missions clairement identifiées.
Justement, n’avons-nous pas, pour répondre aux enjeux présents et à venir, besoin de développer une performance à la hauteur des défis posés ?
De la performance linéaire à la performance systémique
La performance s’inscrit toujours dans un paradigme donné et souvent implicite. La performance a été productiviste, elle est aujourd’hui complexe, collective, systémique.
Si le mot questionne autant, clive les avis et même les générations, c’est qu’il est fortement chargé d’histoire, de nécessité et de sens. Si le sujet questionne autant, c’est qu’il touche plus que jamais le cœur vital de toute organisation : création de valeur, impact social, sociétal et environnemental, attractivité, rémunération, évolution, innovation. La performance est plus encore qu’hier, stratégique.
Alors pourquoi ce désamour ? La performance a fatigué beaucoup d’entre nous avec ses chronomètres, ses métriques, ses reporting, son management éprouvant digne des « Temps Modernes » de Chaplin. Pourtant, il n’existe pas durablement d’organisations – publiques ou privées – grandes ou petites – qui ne soient pas performantes. Alors quel est le problème ? Trois sujets ont marqué négativement la notion de performance. En premier, la performance productiviste qui ne voyait pas ses effets collatéraux négatifs, sociaux ou environnementaux. En second, l’inintelligence humaine d’une certaine forme d’encadrement (« vous n’êtes pas ici pour penser », Taylor) qui par sa forme de non-dialogue, méprise, désengage, avilit. Enfin, en troisième, la performance qui pousse à l’épuisement mental ses meilleurs servants par ignorance profonde du fonctionnement de son premier moteur, l’humain.
Être performant, aujourd’hui, c’est être intelligent avec son système, c’est créer les conditions pour que tous les acteurs du système soient intelligents avec ce qui fait la performance du système, c’est faire en sorte que le collectif des acteurs soit intelligent avec la dynamique qui se joue autour du système, avec tout ce qui le détermine pour qu’il se détermine avec, c’est-à-dire s’adapte, et agisse même avant lui, c’est-à-dire anticipe. Systémique, la performance se doit être auto-évolutive.
Il ne s’agit donc pas de renforcer la culture du « toujours plus performant » sur un mono critère mais d’être « beaucoup mieux performant » sur l’ensemble des enjeux, au nom de finalités pleinement conscientisées, claires, assumées.
La performance d’aujourd’hui : écosystémique et auto évolutive
Être performant dans un contexte dynamique, c’est être collectivement et systémiquement intelligent avec cette dynamique d’évolution. La performance d’il y a un siècle se pensait comme une fluidité monodimensionnelle (la chaine de production), la performance d’aujourd’hui est une dynamique vivante (système générateur de valeur et d’impact) au cœur d’un écosystème en évolution. D’où cette appellation de performance écosystémique, la dynamique des deux systèmes nécessitant d’évoluer de concert.
Et ici, nous avons deux choix. Soit cette l’évolution de cette performance du système est pilotée de l’extérieur par des experts (car c’est trop compliqué pour les opérationnels). En le formulant, nous voyons ici toute la portée du problème : plus c’est complexe, plus c’est lourd en expertises à maitriser, et plus les solutions pour évoluer sont difficiles à implémenter, à faire admettre. Soit cette performance est portée par le collectif des acteurs clés du système : penser ensemble pour agir et évoluer ensemble. Plus c’est complexe, plus le collectif est intelligent pour adapter sa propre complexité et questionner son efficience, plus l’écosystème évolue, plus il est conscient de la nécessité de s’adapter, prend confiance et devient même proactif pour impulser des évolutions possibles de l’écosystème. C’est l’approche que nous portons en dynamique collaborative circulaire : une capacité d’auto-évolution de la performance portée de manière interne, continue.
Nous vous partageons ici nos quatre enseignements fondamentaux :
1) La performance est une capacité collaborative
La performance nécessite adaptation, créativité, proactivité, développement d’une excellence de système. Hier, pensée comme la fluidification linéaire d’efforts individuels (processus), la performance de système nécessite mais véritablement une capacité d’équipes au pluriel, une puissance collaborative. Au-delà de la dynamique collaborative qui engage, énergise et rythme le collective, c’est véritablement une capacité collective qu’il faut développer comme dans les plus beaux sports d’équipe, une volonté de performer ensemble.
2) La performance nécessite d’être portée par un engagement continu
Chaque dirigeant, DRH ou manager sait qu’être performant collectivement demande un plein engagement de chaque acteur, une pleine énergie. Ce que beaucoup voient moins c’est que cet engagement est rarement durable. Les habitudes, les difficultés, les frottements du quotidien banalisent, dégradent cette énergie. Alors, comment développer un engagement continu ? Si l’injonction régulière n’est ni efficace ni intelligente, seule la capacité à régénérer l’engagement est pertinente. La performance continue nécessite ainsi une approche circulaire de l’engagement. Seule donc la dynamique collaborative permet après chaque phase d’action un temps de régénération et un temps de réengagement pour chacun et pour tous.
3) La performance est évolutive et apprenante
La performance induit une maximisation de l’effort de l’instant. La force d’évolution des situations que nous vivons demande au contraire de capitaliser en permanence les expériences vécues, d’en tirer les apprentissages, les enseignements, les suggestions et les opportunités créatives afin d’améliorer en continu les approches et les pratiques pour augmenter la capacité collaborative de l’équipe, pour renforcer son intelligence de l’action.
4) La performance nécessite détermination et dépassement
Dans un contexte marché où tous les acteurs s’améliorent, où chaque partie prenante attend mieux demain qu’hier, dans un contexte de transition où il faut relever chaque jour plus efficacement les défis sociaux et environnementaux, la performance nécessaire ne peut signifier le statu quo. Dès lors la performance stratégique doit s’appuyer sur davantage d’intelligence collective, davantage de détermination, s’inscrire progressivement dans une aspiration au dépassement collectif.
Notre conviction ici est claire : la performance est plus que jamais la manifestation de son engagement collectif, de sa détermination à relever ses défis, à se dépasser.
Si cette dynamique peut sembler exigeante, elle constitue la plus belle expérience collective d’une organisation : celle de se réaliser collectivement sur ce qui constitue son cœur de projet collectif, c’est la quête collective du « beaucoup mieux performant », qui mobilise par le sens, accomplit par l’action collective, permet de grandir ensemble en continu.