L’Entreprise à Mission : vraie, vivante, forte et authentique…

Beaucoup en ont rêvé, une loi de 2019 lui a donné son cadre. Désormais, par des procédures et des indicateurs l’Entreprise à Mission est une réalité respectée et intégrée dans les pratiques de gestion quotidiennes. Désormais, l’Entreprise à Mission existe juridiquement et statutairement. Mais fait-elle encore rêver ?

Pour être véritablement à mission, il est nécessaire qu’elle engage aussi cette mission dans le collectif humain, dans le métier de l’entreprise, dans sa stratégie, dans son écosystème de partenaires, dans sa dynamique sociale.

Comment faire que l’Entreprise à Mission soit vraie, vivante, forte et authentique en création de valeur et en impact ? C’est à ces dimensions d’incarnation et de pertinence que la facilitation stratégique apporte une contribution nécessaire et souvent déterminante.

Une mission, un acte de naissance

La mission n’a de sens que si l’entreprise s’incarne et se reconnait en elle, si celle-ci porte la démarche de l’entreprise. Pour que cette mission soit vraie, vivante, il importe qu’elle soit pleinement portée par l’organisation, les acteurs clés, les collaborateurs. Pour y parvenir, l’approche est de faire naitre cette mission par une dynamique collaborative pour que celle-ci vive dans la durée et soit portée par une dynamique collaborative. Cela nécessite une démarche adaptée à la culture de l’entreprise, du dialogue, des étapes pour coconstruire cette mission.

Devenir « à Mission », quelle stratégie ?

Stratégie est le bon mot car il est nécessaire de maitriser un chemin, des étapes, pour à la fois, faire émerger la mission et impliquer, mobiliser, les parties prenantes. La manière de faire est donc déterminante pour que le résultat – devenir entreprise à mission – soit vrai, soit vivant.

En premier lieu, devenir une Entreprise à Mission, c’est un changement majeur de référentiel. Et un changement, c’est ou bien un risque, ou une opportunité. Nous commençons par mettre le collectif en situation d’opportunité. Comment ? Par une démarche d’écoute et de mise en situation d’opportunité. Pour partager en quoi devenir une entreprise à mission, associant simultanément impact et valeur, enjeux, défis à différents horizons est réellement une opportunité pour chacun, pour tous.

Quand In Principo a accompagné l’ADEME à Sophia Antipolis en 2015 sur sa Raison d’Être nous avons écouté les acteurs, travaillé avec un collectif de régénération, impliqué toutes les instances, pour engendrer une Mission nouvelle, portée par tous et officialisée par sa gouvernance.

Quelle démarche pour quelle nature d’entreprise ?

Une démarche de mise en œuvre d’entreprise à mission s’engage avec des étapes adaptées à la nature et à la taille de l’organisation, une démarche qui engage chacun, qui permet de coconstruire la mission.

Cette mission est d’autant plus importante à bien définir avec le collectif, qu’elle devient le fondement de l’existence de l’entreprise. Elle doit intégrer autant que modifier les fondamentaux de l’organisation. Elle doit être concrète en termes d’impact, pertinente en regard des défis à relever. Et ce pour toutes les parties prenantes à l’interne comme à l’externe.

Si cette mission engage chaque personne concernée, le collectif, les défis, en une seule dynamique, nous générons la meilleure énergie, le meilleur engagement dans la durée.

Engagement de mission et résistance au changement ?

La résistance au changement est un sujet pour les organisations mobilisant des méthodes de « conduite du changement », c’est-à-dire des approches qui consistent à obliger, à contraindre des acteurs de s’engager sur une mission qui n’est pas la leur.

Si vous écoutez – dès le départ une juste diversité de parties prenantes (leurs enjeux, leurs aspirations, leurs préoccupations), si la démarche est coconstruite, si vous rendez les collaborateurs conscients de ce qui se joue, vous les rendez acteurs, moteurs, et créateur de leur propre dynamique, de leur propre Mission, il n’y a pas, ou quasiment pas de résistance au changement.

Pourquoi ? Parce qu’en facilitation stratégique, la dynamique est portée par les acteurs de l’organisation. Une entreprise, c’est un système. Si vous construisez une réalité sans le système, il résiste. C’est normal. Si vous faite émerger la dynamique par le système, par les acteurs ensemble sur les bonnes questions, il devient moteur et intégrateur de ses dilemmes, de ses enjeux. Quand nous avons accompagné le Groupe SNCF sur son engagement dans la Transition Énergétique en 2013-2014, le sujet était précisément celui-là. Initialement, sur le TOP 70, les 2/3 étaient contre car ils présupposaient d’immenses résistances au changement. Nous les avons accompagnés durant 6 mois en facilitation stratégique. Nous avons travaillé sur l’identitaire et le vital. Identitaire – les valeurs, le service public, l’incarnation de la transition écologique la fierté des collaborateurs – le vital, les économies financières et opérationnelles, la préférence des clients. Impact et Valeur. Lors du dernier séminaire avec le TOP 70 nous avons eu un engagement unanime et enthousiaste. Sous l’angle par lequel la démarche a été prise, c’est devenu un sujet de fierté, de performance, d’efficience, d’attractivité, d’affichage sur les locomotives des TGV. Nous n’avons pas eu là de résistance au changement.

Les pièges de l’entreprise à mission

Il y a trois types de piège :

Le premier risque est l’approche verticale. Si un décideur décide seul ou à quelques-uns d’une belle et pertinente mission. C’est peut-être brillant, mais si les collaborateurs, les parties prenantes, n’ont pas fait le chemin nécessaire, la portée de la mission ne sera pas comprise, des pratiques métiers, des habitudes culturelles – peut-être contestables paraîtront niées – il y aura résistance, et même risque de rejet. La posture du dirigeant, des acteurs clés, en fonction des phases de la démarche, est déterminante. Il faut ici un engagement fort sur la démarche, et un certain lâcher-prise sur le contenu pour que celui-ci soit coconstruit, porté.

Le deuxième risque est l’approche radicale. Il arrive parfois que des courants d’acteurs soient trop enthousiastes sur l’impact et engage une mission qui parait à d’autres acteurs comme radicale. Je parle bien de perceptions. Une fois la fièvre de l’engagement retombée, il est fort possible qu’un match retour amende une grande partie des efforts engagés. Là aussi la qualité de la démarche permet la solidité de l’engagement dans la durée.

Le troisième risque est le sentiment d’atteinte au métier lui-même. Une mission n’est pas là pour ajouter à l’entreprise des engagements différents du métier mais pour que l’impact sociétal et la création de valeur s’incarnent sur la même raison d’être. Quand nous avons accompagné EXCO Sud-Ouest, 800 experts comptables, 50 agences à devenir des Fertiliseurs d’entreprises, nous avons fait émerger leur raison d’être, et un nouveau rapport à leur client. La qualité de l’accompagnement comptable permet non seulement, un meilleur pilotage économique, c’est une forme de vitalité, mais permet aussi de renforcer l’entreprise dans son territoire, dans son propre rapport au vivant, dans sa transition écologique. Aujourd’hui EXCO Sud-ouest est chef de file pour le Sud-Ouest de la CEC, la Convention des Entreprises pour le Climat. L’impact est devenu le cœur de leur création de valeur.

Un projet d’entreprise « écosystémique« 

Devenir une entreprise à mission n’est pas un changement d’orientation, c’est un projet d’entreprise systémique. Voire écosystèmique tant l’entreprise devient partie prenante de son écosystème.

La Mission n’est pas un ensemble de textes et d’indicateurs. C’est le cœur du système. La Mission doit naitre du système pour devenir le cœur du système.

Dès lors, il est essentiel que la démarche soit portée avec et par le système : vos acteurs clés, vos équipes, vos partenaires, vos parties prenantes.

C’est ce qu’apporte fondamentalement la facilitation stratégique. L’idée n’est pas de favoriser l’appropriation du projet en aval de sa décision par le chef d’entreprise et quelques experts mais d’engager les acteurs, les parties prenantes, en amont, au commencement de la démarche.