Innover sur sa propre complexité en continu

Si la plupart des organisations, entreprises, administrations, savent innover aujourd’hui sur leurs produits ou leurs services, leurs procédés, leur valeur ajoutée ou même leur expérience client, bien peu innovent sur elles-mêmes : sur leur mode de fonctionnement, leur complexité.  

Arrivé à un certain stade de développement d’une organisation, la complexité, tout le monde s’en plaint. Ce n’est pas propre seulement aux organisations de notre pays. C’est inhérent au développement de toute organisation même si l’on peut bien concéder que certains traits culturels peuvent renforcer certaines spécificités. Joseph Tainter, professeur à l’Université de l’État de l’Utah, a démontré dans son livre « L’Effondrement des sociétés complexes » qu’une organisation comme une civilisation, engendre sa propre complexité. Une organisation définit son cycle de vie entre trois mots : innovation, dynamique et complexité. Celle-ci nait d’une innovation, d’une capacité nouvelle qui lui permet d’enclencher une dynamique de développement. Cette dynamique renforce alors un temps sa capacité d’innovation avec les ressources qu’elle engendre, et accélère son développement. Arrivé à une certaine taille, après avoir rencontré des crises et des difficultés, elle tend à développer des structures, des procédures, des contrôles. C’est le début de la maturité. L’organisation grandit alors doucement en complexité. Et si elle n’y prend pas gare, c’est ce qui finit par l’étouffer. Ce cycle est-il inéluctable ? Non, si le système sait à temps, régulièrement, réduire sa complexité, c’est-à-dire innover sur sa complexité organisationnelle.

Et si ce phénomène parait naturel, il se renforce aujourd’hui : en situation d’incertitude, et plus encore de turbulences, les entreprises – à la fois par réflexe et par prudence – freinent leurs innovations, limitent leur dynamique, augmentent leur contrôle, elles renforcent insidieusement leur complexité à un moment où au contraire elles devraient augmenter en vitalité. 

L’innovation organisationnelle considère que l’organisation est un système où les composantes sont interdépendantes : forme de l’organisation, fonctions et mode de fonctionnement, procédures et processus, management, rôles, culture. L’innovation organisationnelle est l’action d’innover volontairement, régulièrement et avec pertinence sur la fluidité de son système. Comme un système vivant qui améliore son fonctionnement, sa vitalité, sa confiance, par une approche itérative. Il ne s’agit pas de rechercher un état de perfection mais de s’inscrire avec ses équipes dans un état conscient de régulière évolution.

Il y a trois manières d’engager l’innovation organisationnelle :

  1. L’approche consultant expert : des experts auditent l’organisation, modélisent une organisation cible idéale et conduisent le changement pour mettre en place ces évolutions. Les observateurs constatent que cette approche est souvent douloureuse (résistance) car l’organisation cible n’est souvent pas comprise, voire non pertinente au plan culturel ou métier ;
  2. La facilitation stratégique : après une phase d’écoute, le collectif des acteurs clés partagent la situation, les enjeux et les objectifs et coconstruit l’organisation cible et engage une dynamique d’évolution porté par l’organisation elle-même. 
  3. La dynamique organique : après une initialisation en facilitation stratégique et une formation les managers accompagnent régulièrement leur organisation sur le questionnement de la fluidité de leur propre système par l’approche des dynamiques collaboratives circulaires.

Les 3 clés de l’innovation organisationnelle

  • L’innovation organisationnelle, c’est la capacité d’un collectif à comprendre sa singularité de fonctionnement pour mieux l’adapter en fonction de l’évolution des enjeux et circonstances. C’est ce qui permet à un collectif de se questionner pour mieux conjuguer croissance, performance, efficience et donc création de valeur et d’impact sur la société.
  • L’innovation organisationnelle questionne autant les valeurs, la confiance, que les modalités d’animation de projets, de réunion, le partage de l’information, la nécessité ou non de faire des reporting, la gestion du risque. La finalité : « faire mieux ensemble ».
  • L’innovation organisationnelle devient possible quand le collectif humain qui porte l’organisation pense stratégiquement l’ensemble comme un système et propose des évolutions cohérentes, une vision cohérente.

En mobilisant en une démarche d’innovation organisationnelle, l’ensemble de ses acteurs – ceux qui font la fonctionner, ceux qui la vivent, ceux qui en bénéficient – l’entreprise gagne sur sa capacité opérationnelle et sur sa dynamique humaine. La finalité de la démarche n’est pas de faire disparaître la complexité mais de la fluidifier, de simplexifier son fonctionnement pour préserver, valoriser ses atouts, amplifier ses impacts. Avec l’innovation organisationnelle, elle invite ses acteurs à faire évoluer le système avec eux, non en posture d’optimisation (paramètres) mais d’innovation (penser hors cadre).

Il est plus que jamais nécessaire de remettre de l’énergie, de l’humain, des priorités, de la performance, de l’engagement dans votre collectif en une seule démarche pour reprendre la main sur l’incertitude, pour retrouver de l’air, de la liberté… des marges de manœuvre !